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L'Association Départementale des Amis des Carillons
en Côte d'Or


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L'ADAC 21

 

Le carillon de Selongey

"Et si vous voulez recevoir de la vieille ville une impression que la moderne ne saurait plus vous donner, montez, un matin de grande fête, au soleil levant de Pâques ou de la Pentecôte, montez sur quelque point élevé d'où vous dominiez la capitale entière, et assistez à l'éveil des carillons. Voyez à un signal parti du ciel, car c'est le soleil qui le donne, ces mille églises tressaillir à la fois. Ce sont d'abord des tintements épars, allant d'une église à l'autre, comme lorsque des musiciens s'avertissent qu'on va commencer ; puis tout à coup voyez, car il semble qu'en certains instants l'oreille aussi a sa vue, voyez s'élever au même moment de chaque clocher comme une colonne de bruit, comme une fumée d'harmonie. D'abord, la vibration de chaque cloche monte droite, pure et pour ainsi dire isolée des autres, dans le ciel splendide du matin. Puis, peu à peu, en grossissant elles se fondent, elles se mêlent, elles s'effacent l'une dans l'autre, elles s'amalgament dans un magnifique concert. Ce n'est plus qu'une masse de vibrations sonores qui se dégage sans cesse des innombrables clochers, qui flotte, ondule, bondit, tourbillonne sur la ville, et prolonge bien au delà de l'horizon le cercle assourdissant de ses oscillations. Cependant cette mer d'harmonie n'est point un chaos. Si grosse et si profonde qu'elle soit, elle n'a point perdu sa transparence. Vous y voyez serpenter à part chaque groupe de notes qui s'échappe des sonneries ; vous y pouvez suivre le dialogue, tour à tour grave et criard, de la crécelle et du bourdon ; vous y voyez sauter les octaves d'un clocher à l'autre ; vous les regardez s'élancer ailées, légères et sifflantes de la cloche d'argent, tomber cassées et boiteuses de la cloche de bois ; vous admirez au milieu d'elles la riche gamme qui descend et remonte sans cesse les sept cloches de Saint-Eustache ; vous voyez courir tout au travers des notes claires et rapides qui font trois ou quatre zigzags lumineux et s'évanouissent comme des éclairs. Là-bas, c'est l'abbaye Saint-Martin, chanteuse aigre et fêlée ; ici, la voix sinistre et bourrue de la Bastille ; à l'autre bout, la grosse Tour du Louvre, avec sa basse-taille. Le royal carillon du Palais jette sans relâche de tous côtés des trilles resplendissants sur lesquels tombent à temps égaux les lourdes couppetées du beffroi de Notre-Dame, qui les font étinceler comme l'enclume sous le marteau. Par intervalles vous voyez passer des sons de toute forme qui viennent de la triple volée de Saint-Germain-des-Prés. Puis encore de temps en temps cette masse de bruits sublimes s’entrouvre et donne passage à la strette de l'Ave Maria qui éclate et pétille comme une aigrette d'étoiles. Au-dessous, au plus profond du concert, vous distinguez confusément le chant intérieur des églises qui transpire à travers les pores vibrants de leurs voûtes."

[Victor HUGO, Notre Dame de Paris 
Livre Troisième, II-Paris à vol d'oiseau, pp.109-110]